La Fed amorce son cycle d’assouplissement
Septembre 2024
« Laissez les bons temps rouler » est une expression bien connue de La Nouvelle-Orléans qui signifie « que la fête continue »! Avec un quatrième mois de hausse consécutif en août (une première en trois ans), une ambiance digne du Mardi gras a continué d’animer les marchés des titres à revenu fixe nord-américains cet été. Même s’ils ont tardé à se joindre aux réjouissances, Jerome Powell et les autres dirigeants de la Réserve fédérale (Fed) sont arrivés à la réunion de septembre avec une généreuse réduction de taux de 50 points de base (pb), de façon à maintenir l’effervescence. Nous, les investisseurs en obligations, formons un groupe inclusif et avons été plus que ravis de convier nos amis des marchés boursiers à la fête. C’est ainsi que la plupart des principaux indices boursiers américains ont atteint de nouveaux sommets. En août, l’indice canadien des obligations universelles a signé un nouveau gain de 0,3 % (graphique 1), portant son rendement sur quatre mois à 5,7 %. Les rendements en cumul annuel et sur un an se sont élevés à 2,3 % et à 7,9 % respectivement (tableau 1). De plus, au moment d’écrire ces lignes (19 août), le marché canadien des obligations affichait une excellente tenue jusqu’à présent en septembre, en hausse de 1,7 % en cumul mensuel. Le rendement global du marché obligataire américain a pour sa part progressé de 1,4 % d’un mois à l’autre en août, propulsant les gains sur trois mois à 4,8 %. En cumul annuel et sur un an, les rendements ont été de 3,3 % et de 7,4 % respectivement, et le rendement est de 1,6 % jusqu’ici en septembre. Les investisseurs continuent de tirer parti des niveaux historiquement attrayants des taux de rendement obligataires en dépit de leur récent recul. De fait, les marchés obligataires canadiens et américains dans leur ensemble ont généré des rendements d’environ 3,5 % et 4,2 % respectivement. Comme nous l’avons mentionné, les actifs risqués ont également enregistré une forte remontée récemment, malgré certains épisodes d’incertitude et de volatilité. En cumul annuel (encore une fois au moment d’écrire ces lignes), l’indice S&P 500, l’indice Dow Jones des valeurs industrielles et l’indice composé Nasdaq affichaient une progression de 22,6 %, de 14,1 % et de 22,8 % respectivement. L’indice S&P/TSX tire un peu de l’arrière avec un rendement cumulatif annuel (au 19 août) de 13,9 %. Ainsi, avec des rendements d’environ 10 % et 15,5 % respectivement au Canada et aux États-Unis, on peut dire que les investisseurs qui détiennent des fonds équilibrés 60/40 participent aux célébrations sur le marché jusqu’à maintenant en 2024.
Graphique 1
Sources : FTSE Russell et Bloomberg
En août, depuis le début de l’année et sur un an, les obligations fédérales canadiennes ont généré des rendements respectifs de +0,40 %, 2,27 % et +6,98 %, contre +0,33 %, 2,32 % et +7,88 % pour l’indice global des obligations universelles. Les obligations de sociétés ont progressé de 0,26 % sur un mois, un rendement légèrement inférieur à celui des obligations d’État. Or, les rendements de +3,68 % en cumul annuel et de +9,61 % sur les 12 derniers mois placent les obligations de sociétés canadiennes de qualité largement devant les titres d’État. Les obligations provinciales ont avancé de 0,29 % au cours du mois et affichent désormais des rendements de 1,37 % en cumul annuel et de +7,62 % sur un an.
Rendement total | 1 mois | 3 mois | Cumul annuel | Sur un an |
---|---|---|---|---|
Ensemble du marché obligataire canadien | 0.33 % | 3.86 % | 2.32 % | 7.88 % |
Ensemble du marché obligataire américain | 1.43 % | 4.77 % | 3.29 % | 7.35 % |
Obligations d’État canadiennes | 0.57 % | 3.81 % | 2.09 % | 6.78 % |
Obligations d’État américaines | 1.31 % | 4.64 % | 2.72 % | 6.01 % |
Obligations de sociétés canadiennes de qualité | 0.26 % | 3.47 % | 3.68 % | 9.61 % |
Obligations de sociétés américaines de qualité | 1.53 % | 4.60 % | 3.97 % | 9.45 % |
Obligations de sociétés américaines à haut rendement | 1.59 % | 4.58 % | 6.29 % | 12.48 % |
Sources : FTSE Russell, ICE et Bloomberg |
Politique monétaire
Les investisseurs avaient de toute évidence les yeux rivés sur la Réserve fédérale au cours des dernières semaines. Il était évident depuis longtemps que le cycle d’assouplissement serait lancé en septembre, mettant fin à une période historique de resserrement monétaire qui a duré quatre ans. À l’approche de la réunion de septembre de la banque centrale, le débat s’est toutefois intensifié sur l’ampleur de la baisse des taux : 25 ou 50 pb? À quelques jours de la réunion, les investisseurs avaient intégré une baisse d’environ 38 pb du taux directeur, exactement à mi-chemin entre une réduction de 25 et de 50 pb. Ce fait illustre l’ampleur de l’incertitude, ce qui ne s’était pas vu depuis plus de dix ans à l’approche d’une décision de politique monétaire. On aurait pu présenter des arguments convaincants en faveur d’un scénario ou de l’autre, compte tenu des données contradictoires dévoilées ces derniers temps et de l’équilibre des risques liés au double mandat de la Fed – veiller à la stabilité des prix et au plein emploi –, lesquels évoluent dans des directions opposées. Même si je m’attendais davantage à une baisse de 25 pb, je peux comprendre la décision. Puisque l’inflation de l’économie américaine tend clairement à se rapprocher de la cible (même si elle la dépasse encore) et que le marché du travail ralentit (même s’il reste vigoureux), le président Powell semble avoir voulu donner un grand coup de départ pour ramener le taux directeur au point neutre, que la Réserve fédérale estime actuellement être autour de 3 %. Ainsi, avec un taux directeur à 5,5 %, la banque centrale a jugé qu’il était dans l’intérêt supérieur de l’économie de lever rapidement les obstacles à un assouplissement monétaire. Quelle trajectoire le taux directeur empruntera-t-il? Selon les projections de la Fed, on peut s’attendre à deux autres baisses de 25 pb cette année et à des réductions totalisant 100 pb en 2025. Ces six réductions de 25 pb feraient passer le taux des fonds fédéraux dans une fourchette de 3,25 à 3,5 % d’ici la fin de l’année prochaine. Pour leur part, les investisseurs s’attendent toujours à une position plus conciliante et prévoient près de trois baisses d’ici la fin de l’année (graphique 2), puis cinq autres en 2025, pour un total de près de huit baisses d’ici la fin de 2025, soit 50 pb de plus que ce que prévoit la banque centrale à l’heure actuelle. Un tel écart et le ton un peu plus ferme de la Fed ont quelque peu pesé sur les taux de rendement des obligations à long terme. De fait, le taux de référence des obligations du Trésor américain à 10 ans avait augmenté (au moment de la rédaction) de près de 15 pb par rapport au taux plancher affiché avant la réunion du FOMC (à peu près 3,75 % contre environ 3,60 %).
Graphique 2
Source : Bloomberg
Malgré ce rebond et la baisse des taux, le taux de rendement des obligations à 10 ans demeure bien en deçà du taux directeur (graphique 3), ce qui pourrait continuer à exercer une pression à la hausse sur les taux de rendement à court terme. Cela dit, le début d’un important cycle d’assouplissement devrait favoriser la baisse des taux de rendement des obligations à moyen terme. Ici au Canada, les investisseurs s’attendent maintenant à d’autres réductions des taux de l’ordre de 75 pb cette année et de 100 pb au premier semestre de 2025. Ces baisses porteraient le taux du financement à un jour dans une fourchette de 2,5 à 2,75 % d’ici l’été prochain, ce qui procurerait un soulagement bienvenu aux emprunteurs canadiens.
Graphique 3
Source : Bloomberg
Bilan éclair du marché
Rendements des obligations d’État | 31 déc. | 31 août | Sur un mois | Sur un trim. | Cumul annuel |
---|---|---|---|---|---|
Obligations d’État canadiennes à 2 ans | 3,89% | 3,33% | -0,12% | -0,85% | -0,56% |
Obligations d’État canadiennes à 10 ans | 3,11% | 3,16% | 0,00% | -0,47% | 0,05% |
Obligations du Trésor américain à 2 ans | 4,25% | 3,92% | -0,34% | -0,96% | -0,33% |
Obligations du Trésor américain à 10 ans | 3,88% | 3,90% | -0,13% | -0,60% | 0,02% |
Sources : FTSE Russell, ICE et Bloomberg |
Courbe de rendement des obligations d’État | 31 déc. | 31 août | Sur un mois | Sur un trim. | Cumul annuel |
---|---|---|---|---|---|
Écart entre les taux d’émissions d’État canadiennes à 10 et 2 ans | -0,78% | -0,17% | 0,12% | 0,38% | 0,61% |
Écart entre les taux d’émissions d’État américaines à 10 et 2 ans | 1,14% | -0,02% | 0,21% | 0,36% | 0,36% |
Sources : FTSE Russell, ICE et Bloomberg |
Écarts de rendement des obligations d’État | 31 déc. | 31 août | Sur un mois | Sur un trim. | Cumul annuel |
---|---|---|---|---|---|
Écart entre les taux d’émissions d’État canadiennes et américaines à 2 ans | -0,36% | -0,59% | 0,22% | 0,10% | -0,23% |
Écart entre les taux d’émissions d’État canadiennes et américaines à 10 ans | -0,77% | -0,74% | 0,13% | 0,13% | 0,03% |
Sources : FTSE Russell, ICE et Bloomberg |
Inflation en Amérique du Nord | 31 déc. | 31 août | Sur un mois | Sur un trim. | Cumul annuel |
---|---|---|---|---|---|
IPC de base médian au Canada sur 1 an | 3,40% | 2,30% | -0,10% | -0,40% | -1,10% |
IPC de base aux États-Unis sur 1 an | 4,00% | 3,20% | 0,00% | -0,20% | -0,80% |
IPC de base médian au Canada sur 6 mois, annualisé | 3,11% | 2,38% | 0,19% | 0,08% | -0,73% |
IPC de base aux États-Unis sur 6 mois, annualisé | 3,92% | 3,81% | -0,24% | -1,19% | -0,11% |
Source: Bloomberg |
Attentes relatives aux politiques monétaires | 31 déc. | 31 août | Sur un mois | Sur un trim. | Cumul annuel |
---|---|---|---|---|---|
Attentes relatives au taux directeur canadien sur un an | 3,72% | 3,07% | -0,84% | -1,41% | -0,65% |
Attentes relatives au taux directeur américain sur un an | 3,59% | 3,20% | -1,20% | -1,68% | -0,39% |
Sources : FTSE Russell, ICE et Bloomberg |
Écarts de rendement des obligations de sociétés | 31 déc. | 31 août | Sur un mois | Sur un trim. | Cumul annuel |
---|---|---|---|---|---|
Obligations de sociétés canadiennes de qualité | 134 | 123 | 3 | 5 | -11 |
Obligations de sociétés américaines de qualité | 99 | 93 | 0 | 8 | -6 |
Obligations de sociétés canadiennes de qualité - américaines de qualité | 35 | 30 | 3 | -3 | -5 |
Obligations de sociétés américaines à haut rendement | 323 | 305 | -9 | -3 | -18 |
Obligations de sociétés américaines à haut rendement - sociétés américaines de qualité | 224 | 212 | -9 | -11 | -12 |
CDX des émissions de qualité | 56,7 | 49,3 | -3 | 0 | -7 |
Rendement excédentaire des obligations canadiennes de qualité | 0,81% | -0,19% | -0,19% | -0,29% | 1,32% |
Rendement excédentaire des obligations américaines de qualité | 0,31% | 0,14% | 0,14% | -0,40% | 1,31% |
Sources : FTSE Russell, ICE et Bloomberg |
Positionnement sur les marchés de taux : i) duration neutre; ii) exposition neutre à la courbe des taux; iii) surpondération des prêts hypothécaires résidentiels de premier ordre au Canada; iv) surpondération des obligations à rendement réel; v) surpondération des obligations du Trésor américain.
Positionnement sur les marchés du crédit : i) surpondération des obligations de sociétés; ii) maintien d’un penchant en faveur des émissions de qualité plutôt qu’à haut rendement et, au sein des titres de qualité, des positions plus défensives; iii) surpondération du Canada et sous-pondération des États-Unis.
2 ans | 5 ans | 10 ans | 30 ans | |
---|---|---|---|---|
Année précédente | 4,55 | 3,84 | 3,56 | 3,41 |
Mois précédent | 3,45 | 3,09 | 3,16 | 3,21 |
3 sept. 2024 | 3,26 | 2,95 | 3,07 | 3,18 |
Source : Bloomberg |
2 ans | 5 ans | 10 ans | 30 ans | |
---|---|---|---|---|
Année précédente | 4,88 | 4,30 | 4,18 | 4,29 |
Mois précédent | 4,26 | 3,91 | 4,03 | 4,30 |
3 sept. 2024 | 3,88 | 3,65 | 3,84 | 4,13 |
Source : Bloomberg |
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